La densification douce, construire sans détruire
Parmi les différentes politiques d’urbanisme durable, comme la Zéro Artificialisation Nette, la densification douce permet de construire, sans détruire, ni occuper de nouveaux espaces. Avec cette méthode « non intrusive », on peut produire de nouveaux logements par division parcellaire (division foncière), par création d’appartements accessoires (annexes), ou par division, surélévation ou extension d’un logement existant. Souvent à l’initiative des particuliers, la densification douce est ensuite encadrée par les collectivités, dans le cadre de leur projet d’urbanisme.
En Amérique du Nord cette méthode est une pratique courante, pour produire des logements à coût modéré. En France, elle s’inscrit dans le cadre légal, depuis quelques années (loi ALUR du 24 mars 20142), mais son intégration dans la planification urbaine reste encore à la marge. Elle est néanmoins pratiquée par certaines collectivités, comme Limoges, depuis 2013, qui compte 17 % de logements issus de la division parcellaire3 dans sa périphérie.
La végétalisation, levier de la transition écologique en ville
Alors si la densification douce semble plus attrayante que la « bétonisation » issue des politiques urbaines des années 1970-1980, il n’en reste pas moins que la pression sur l’environnement est importante. Plus d’individus, plus de pollution, plus d’émissions de carbone… comment concilier densité et qualité de vie ?
La végétalisation urbaine apparaît comme l’une des solutions face à cette problématique. Longtemps considérée comme un phénomène de mode, elle est aujourd’hui un levier efficace pour maintenir une bonne qualité environnementale en ville.
En effet, elle peut faire chuter les températures jusqu’à 2°C⁴ et limiter ainsi l’effet « îlot de chaleur ». Elle permet également de filtrer et de dépolluer les eaux pluviales, d’alimenter les nappes phréatiques, et de réduire les risques d’inondation.
Autre bienfait : l’air est moins pollué dans un espace arboré, par absorption naturelle des particules (jusqu’à 20 kg de particules absorbées par an, par un arbre adulte)5.
Mais, selon Alexis Tricoire, créateur de l’agence Design for Nature, réintroduire le végétal en ville permet surtout « de maintenir la biodiversité », dans un contexte où « le réchauffement climatique et la disparition des écosystèmes sont des phénomènes interdépendants, en forte progression ».
Des solutions végétales au service d’une ville résiliente
Canopée, toitures végétalisées, promenades arborées, murs végétaux, potagers partagés, ruches… les solutions sont nombreuses pour ré-inviter la nature et la biodiversité dans nos villes. Ces initiatives peuvent être portées par des particuliers (permis de végétaliser à demander en mairie) ou par les municipalités, dans le cadre de dispositifs nationaux pour favoriser la végétalisation, comme « Nature en Ville »6 ou « Quartiers Fertiles »7.
Deux intérêts principaux au développement de la végétalisation en ville :
- Garantir un meilleur équilibre pour préserver la biodiversité, et ainsi permettre le développement d’un écosystème durable, avec la réintroduction directe ou indirecte d’espèces qui n’avaient plus de place dans l’espace urbain (plantes sauvages, abeilles, …),
- Rafraîchir l’espace urbain, victime de la pollution et de la bétonisation excessive des dernières décennies.
Le mobilier végétal : créer des îlots de fraîcheur
Alexis Tricoire, designer et scénographe, est créateur de mobilier urbain. Il vient de lancer le concept FreshCity, une ombrière végétale modulable. Elle permet aux passants de s’asseoir à l’ombre des plantes grimpantes, et de se rafraîchir, grâce au phénomène d’évapotranspiration des feuilles, apportant ainsi une solution aux problématiques accrues de réchauffement des villes.
« Notre rapport à la nature a changé, nous cherchons désormais à vivre en harmonie avec elle, et à savourer le bien-être qu’elle procure, plutôt que de l’éradiquer. » Alexis Tricoire
Toutefois, pour le designer, ces solutions de végétalisation ne sont que « des rustines rapides, pour faire face à l’urgence du réchauffement climatique » et elles ne peuvent en aucun cas « restaurer à elles seules les écosystèmes et la biodiversité ». Il est ainsi essentiel de lier aménagement urbain et politiques environnementales à plus grande échelle pour mieux répondre aux enjeux écologiques de la ville de demain.
La ville verte, un critère d’attractivité
En 2020, huit personnes sur dix estimaient, que la proximité d’un espace vert est un critère important pour choisir un logement8. Les attentes en matière de végétalisation sont encore plus élevées dans les quartiers prioritaires, où quatre habitants sur dix en font une priorité absolue9. Selon l’Observatoire des villes vertes, qui publie tous les trois ans le palmarès des villes les plus végétalisées, Angers, Nantes et Metz sont les villes les plus vertes de France en 2020 !
Avec la migration et la densification urbaine qui se profilent, la végétalisation pourrait bien devenir la pierre d’angle, qui permettra aux urbanistes de concilier cadre de vie, maintien de la cohésion sociale et transition écologique.
ZOOM SUR LE MOBILIER URBAIN VÉGÉTALISÉ - Avec Alexis Tricoire
Le Carré Michelet à la Défense
Dans les terrasses et les jardins intérieurs de ce centre d’affaires, le mobilier végétal accueille une centaine d’espèces, dont 80 % sont endémiques d’Île-de-France et 20 % sont des plantes décoratives. L’objectif était de « proposer des espaces de convivialité extérieurs et de permettre à la vie sauvage de reprendre sa place », précise Alexis Tricoire, concepteur du mobilier du Carré Michelet.
La canopée
A l’instar d’une petite forêt urbaine, Alexis Tricoire travaille sur des pergolas horizontales recouvertes de végétation qui génèrent de la fraîcheur par évapotranspiration des feuilles et de l’ombre sur une grande surface, mais qui restent « assez complexes à installer ».
Les murs végétaux
L’avantage des murs végétaux est l’apport de fraîcheur, également par évapotranspiration des feuilles, et la création d’un « paysage ravissant, quinous porte sur une fréquence plus haute ». Inconvénient néanmoins : ils sont gourmands en eau et ne font donc sens, écologiquement parlant, que s’ils sont couplés à un système de recyclage des eaux de pluies.
A propos d’Alexis Tricoire
Chef de file du design végétal, Alexis Tricoire place le vivant au cœur de notre univers quotidien.
Son ambition est de créer du lien entre les urbains et la nature au travers d'installations poétiques et inattendues.
Il intervient dans des lieux divers, que ce soient des gares, des centres commerciaux et des sièges sociaux, mais aussi des espaces culturels : musées, centres d'art et lieux d'expositions...
- https://www.un.org/fr/un75/shifting-demographics
- https://www.onb-france.com/actualites/question-pertinente-sur-linterdiction-de-diviser-contenue-dans-le-cahier-des-charges-dun
- http://www.loire.gouv.fr/IMG/pdf/Densification_douce-plaquette_DDT.pdf
- https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/vegetaliser-villes-comprendre
- https://agirpourlatransition.ademe.fr/collectivites/fiches/vegetaliser-villes-comprendre
- https://www.cohesion-territoires.gouv.fr/sites/default/files/2022-02/DP%20Nature%20en%20ville.pdf
- https://www.anru.fr/actualites/quartiers-fertiles-revivez-le-lancement-du-reseau-des-laureats
- La Nature En Ville, Agence d’Urbanisme Auray, Rhône, Avignon, Vaucluse, juin 2020.
- Dossier de presse Nature en Ville, quartiers prioritaires, quartiers d’innovation. Ministère chargé de la ville, février 2022.